Cette notion désigne des classes élémentaires, primaires, secondaires, au sein desquelles se déploie une pluralité d’enseignements, programmes, disciplines mobilisés par des agents éducatifs. Complexe scolaire = ensemble pédagogique organisé. Celui-ci façonne la distribution, la transmission et bien entendu l’apprentissage de savoirs et de savoir-faire mais aussi des ignorances et incompétences, des manières de parler et de se taire. Il valorise tantôt l’esprit critique tantôt des pensées conservatrices, des modalités d’émancipation mais aussi d’obéissance… De fortes contradictions traversent l’école. Comme en témoignent aussi les situations de réussite et d’échec des élèves. Or, ces derniers n’en sont pas les protagonistes exclusifs. Des logiques extra-individuelles interviennent, telles la promotion de certaines filières et la disqualification d’autres, l’accès aux établissements privés ou publics en fonction d’une charte scolaire qui est aussi une domiciliation sociale, les systèmes de sélection, de classement et de notation – sans oublier les habitus de nombre d’enseignants qui, y compris à leur insu, sont enclins à stimuler les meilleurs élèves au dépend de ceux qui, trop souvent, se résignent aux discriminations dont l’école est le théâtre.
Mais si l’école consolide les inégalités sociales en les transformant en inégalités scolaires (Bourdieu), elle connait aussi des modifications et des mutations qui, à la marge, cherchent à modérer sans nullement gommer cette dynamique finalement implacable. Des expériences pédagogiques sont tentées par nombre d’enseignants toujours passionnés par la transmission de contenus et de formes qui isolent un peu moins l’école des soucis des élèves et des familles – des enseignants conscients du rôle que l’institution leur fait jouer. Quant aux élèves, ils passent beaucoup d’années au sein de l’école : celle-ci est un appareil de formation intellectuelle, professionnelle – et aussi psychique, consciente et inconsciente. Complexe scolaire = ensemble organisé autour d’un vecteur idéologique, à la fois objectif et subjectif.
Jean-Jacques Bonhomme – février 2014
