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Film de Xavier Dolan, avec Anne Dorval, Antoine Olivier Pilon, Susanne Clément (mai 2014)

Les 2h18 de Mommy représentent une plongée aussi asphyxiante qu’émouvante dans l’intimité des relations unissant un fils et sa mère. Rejeté par l’institution, représentée ici par un centre d’accueil pour enfants atteints de troubles psychiques, Steve, 16ans, se voit contraint de vivre avec/chez sa mère, elle aussi forcée de récupérer au domicile son ingérable enfant.

L’évaluation posée par les équipes éducatives et intervenants sociaux ou judiciaires en tout genre, au regard d’un agrégat de postures idéologiques dont découlent des représentations de la famille qui habitent et traversent plus ou moins consciemment les sujets, peut entrainer un placement d’enfant dans un foyer ou une famille dite d’accueil. Les choses se présentent de façon différente dans Mommy car c’est le constat par l’institution de son incapacité à prendre en compte un enfant et ses caractéristiques forcément propres qui conduisent à un placement au sein du domicile maternel. L’institution impose à sa mère de le reprendre chez elle, au travers d’une scène – de convocation justement – où le film prend l’institution en flagrant délit de normose.

Xavier Dolan, qui assure les principaux postes (réalisateur, scénariste, monteur, costumier) s’inspire de son rapport à sa mère pour construire la trame du film. Il avait déjà semé les graines dans son premier long métrage, au titre qui amusera (peut-être) les psychanalystes : J’ai tué ma mère.

Steve est violent, imprévisible, impulsif, sorte de grenade dégoupillée mais aussi fin analyste des enjeux où il évolue. Cheville ouvrière de cette (re)conquête maternelle, la voisine d’en face, prof traumatisée, viendra prendre une place en formant ainsi un triangle familial et se posant comme une seconde mère pour Steve. La forme-famille ultra-dominante au cinéma (papa, maman, les enfants, le chien et le monospace), se trouve bousculée par ce trio qui, fidèle à la promesse faite par Steve à sa mère, compose une « sacrée équipe ».

Film de bout en bout éblouissant, audacieux, porté par des acteurs épatants et le grand talent du metteur en scène – au service d’une histoire d’amour merveilleuse, véritable choc. Comme le clame d’un air narquois Anne Dorval, la mère à qui le foyer rend son fils au début du film : « les pessimistes seront confondus », affichant ainsi un espoir qui jamais ne s’estompera. Réquisitoire pour une conception de la famille forcément plurielle, où la mère de Steve peut faire un pas de côté face à une vision idéalisée de ce que devrait être une famille.

Sébastien Bertho – février 2015

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