Barbara Cassin : La nostalgie : quand donc est-on chez soi ?
À partir des premiers sens donnés à la nostalgie : mal du pays, douleur (algos) du retour (nostos), il nous est proposé ici une aventure pour tenter de penser la question. Enracinement et déracinement, voilà ce autour de quoi tournerait la nostalgie.
L’auteure nous fait cheminer avec Ulysse, roi d’Ithaque, Enée, héros de la guerre de Troie, et Hannah Arendt, philosophe. Elle interroge les constructions qui fondent la fiction d’appartenance à une identité, une religion, une culture, une terre, un pays, une époque…. Avec ces trois figures, un rapport se dessine entre patrie, exil et langue maternelle. Ce qui marque la sensibilité de l’exil c’est le « plus d’une langue ». Propos illustré par la phrase de Jacques Derrida : « on ne parle jamais qu’une seule langue, on ne parle jamais une seule langue ».
Par une approche philosophique, psychanalytique et poétique cet essai donne une réponse à la question « quand donc est-on chez soi ? » : quand on est accueilli, soi-même, ses proches et sa/ses langues.
De la langue maternelle qui habite chacun à celle du lieu d’exil qui est étrangère mais que l’exilé finira peut-être par habiter, l’auteure nous montre avec une certaine érudition que la nostalgie est moins une affaire de sol que de langue.
Claudine Schoukroun – Septembre 2017